COUSINES : THE MOVIE
 
 
« Cousines », le tout dernier film de Richard Sénécal, nous plonge au coeur d'un drame humain et universel. Présenté pour la première fois à la 2e édition du Festival film Jacmel, en août 2005, « Cousines » est l'histoire de Jessica Gentil, (Jessica Généus), une jeune fille qui vivait tranquillement à Port-au-Prince, chez Margareth (Catherine Hubert) et Gasner (Reynald Dimanche), des amis de son père qui vit aux Etats-Unis. Cependant, tout va basculer. À la mort de son père, Jessica se retrouve à la rue et est recueillie par Johanne (Soledad E. Jean), une camarade de classe, aux moeurs très légères. Fille sans ressources, Johanne se livre à plusieurs amants pour survivre dans un milieu qui ne fait pas de cadeau. Jessica pourra-t-elle résister à la tentation ? Restera-t-elle sincère à l'amour de Bobby (Jerry L. Rocher), ou se donnera-t-elle à Ralph (Jimmy Jean-Louis), le "diaspora", ou encore résistera-t-elle à l'offre alléchante du millionnaire Félix ("Pyram" Roland Dorfeuille)? Telles sont les interrogations que soulève l'intrigue. 

Après Barikad où il était question des barrières entre les classes sociales, à l'encre incisive de sa caméra, Sénécal aborde encore une fois dans son cinéma, qu'il veut d'abord social, un thème sensible qui nous interpelle tous : le brassage, cette forme de prostitution dans laquelle bien des jeunes filles se trouvent livrées pour assurer leur survie en cumulant les amants. Il ne s'agit pas de brassage culturel, mais de toute autre chose. Brassage d'argent, de coeur, de corps, de sentiment. C'est à qui offre le plus. « Kilès ou ye pou gen yon fanm pou kò w », chanson du groupe hip hop « Triping Live » et bande originale du film, donne le ton. 

« Cousines » traite un sujet grave. Il parle d'un phénomène qui est le lot de plus d'un. Livré à elles-mêmes, bien des jeunes filles n'ont pour toute ressource que leur corps qu'elles négocient au plus offrant. Elles brassent. Mais il arrive aussi que tant va la cruche à l'eau elle se casse. Et là, c'est la catastrophe.

Cependant, au-delà de ces considérations, « Cousines » est aussi un film d'amour, ou un film sur l'amour, avec tous ses corollaires. L'amour difficile voire impossible, qui nous ramène un peu à Barikad. « Figure-toi qu'un madré comme moi est tombé amoureux d'une pute. C'est bien ma veine », lance l'un des protagonistes. 

On y soulève également des questions qui se posent depuis toujours comme: l'amour s'achète-t-il ? Peut-on s'acheter une femme ? A qui la faute si une femme est pute ? Si la femme est pute, n'est-ce pas par la volonté des hommes ? Des questions qui restent sans réponses.« L'amour dans tous ses azimuts » aurait tout aussi bien pu convenir comme titre à ce film qui traite du thème-roi du cinéma local sur ses facettes les plus aigues. 

Le film a surtout le mérite de traiter le thème sous un angle audacieux et un peu cru. Le spectateur est pris sur le vif. Il est secoué sur son siège et pourrait bien se mettre debout, tant le sujet, les mots et les images sont saisissants. Rien à voir avec les niaiseries auxquelles on nous a habitués depuis quelque temps. Amateur de bons sentiments et d'amour à l'eau de rose, passez votre chemin. 

A la fois scénariste et réalisateur, Richard filme avec l'encre de sa camera, si on peut dire. Cela se ressent dans la réalisation où les images frappent et accrochent. Ce qui n'empêche pas au scénario d'être solide et la psychologie des personnages de tenir la route. L'émotion est palpable, et l'ambiance et les scènes reflètent bien l'Haïti d'aujourd'hui. A l'intérieur comme à l'extérieur. 

Des scènes authentiques, profondes, frappantes de simplicité mais très efficace, une histoire crue, bien ficelée, poignante, un thème tabou, de bons acteurs, connus et moins connus, sont les ingrédients qui ont fait que ce film a obtenu deux certificats d'excellence au Brooklyn International film récemment.

Cette réalisation de Richard Sénécal met en vedette Jimmy Jean Louis, Gessica Généus, Jerry Lenz Rocher, Soledad Elizabeth Jean, avec la participation de Rudolph Moïse, de Pyram et de Ricardo Lefèvre. Pour répéter Variety magazine, « Cousines» est « une fable morale simple enveloppée de beauté (s) ».

Jonel Juste
jgli02@yahoo.fr

Original link : http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=33439&PubDate=2006-09-05mailto:jgli02@yahoo.frhttp://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=33439&PubDate=2006-09-05shapeimage_2_link_0shapeimage_2_link_1
Friday, September 8, 2006
« Cousines » au coeur d'un drame humain